Nucléaire iranien : pourquoi Téhéran dérange Trump

L’isolationnisme de Trump devait trouver avec l’Iran son meilleur allié. Il en a fait son pire ennemi.

1 – LA QUESTION NUCLEAIRE IRANIENNE, centrale dans la communication politique n’est pas le cœur du problème iranien. Si l’Iran est confiné d’un point de vue économique, c’est pour une raison très différente : ce pays est le laboratoire de la contre-mondialisation. S’il dérange, c’est qu’il a mis au point un système idéologique extrêmement élaboré prônant le rétablissement des frontières, la perpétuation des identités et désignant comme ennemi le mondialisme et son moteur. Continuer la lecture de « Nucléaire iranien : pourquoi Téhéran dérange Trump »

Corée : pourquoi la guerre est peu probable

La péninsule coréenne est au carrefour des luttes immuables entre les empires maritimes et les puissances continentales. Derrière les tensions actuelles, qu’il faut décrypter à la lumière de l’histoire, de discrètes forces centrifuges tendent à rapprocher les Corées et à les intégrer dans l’économie mondiale.

UNE OFFICINE britannique déclarait récemment que le risque de guerre était à prendre au sérieux en Corée. Cette annonce mérite quelques réflexions.

1- Le duel rhétorique entre Donald Trump et Kim-Jong-un profite aux deux présidents. Il permet aux États-Unis en pleine rétractation géopolitique de donner l’illusion de la puissance. Il permet d’autre part au président de la Corée du Nord de négocier en position plus avantageuse le prochain accord nucléaire. Continuer la lecture de « Corée : pourquoi la guerre est peu probable »

Carnet de voyage : « En flânant à travers Téhéran »

Impressions de voyage de l’auteur à Téhéran. Thomas Flichy de La Neuville a publié L’Iran au-delà de l’islamisme (L’Aube, 2013) et dirigé avec Antoine de Prémonville Géopolitique de l’Iran (PUF, 2015).

JE FUS SAISI à ma descente d’avion par cette espèce d’odeur un peu âcre qui me rappelait que j’avais retrouvé Téhéran la miséreuse et son haleine pétrolière. Le temps d’attendre une heure en compagnie d’un acheteur de tapis italien et d’un allemand en mission interlope, je me frayai un chemin dans la rue, égayé par le concert étrange des imperceptibles coups de klaxon qui accompagne le flot anarchique des voitures. L’on circule bien la nuit sous les banderoles à la gloire du régime et il me fallut attendre la chaleur du jour suivant pour examiner la façon dont la ville avait changé. Continuer la lecture de « Carnet de voyage : « En flânant à travers Téhéran » »

Retour de Total sur le marché iranien : une victoire diplomatique de premier plan

L’Iran et Total signent lundi 3 juillet un contrat de 4,8 milliards de dollars pour l’exploitation du champ gazier de South Pars. Cette réussite s’explique pour des raisons stratégiques propres au groupe Total, mais également culturelles et géopolitiques. Décryptage de Thomas Flichy de La Neuville.

LE GROUPE TOTAL, dont la représentation est située dans les quartiers nord de Téhéran, n’a jamais mis fin à sa présence en Iran. Même au plus fort de la crise, le groupe a tenu à conserver une représentation sur place. Ceci était d’autant plus intelligent que la France avait adopté une position très dure vis-à-vis de l’Iran, à l’inverse de l’Italie, l’Espagne ou l’Allemagne, qui avaient poursuivi leurs affaires sur place. C’est donc la stratégie de modération et de réalisme propre au groupe français qui a payé. Le ministre iranien des Affaires étrangères faisait une discrète visite en France la semaine dernière afin de mettre une touche finale aux négociations.  Continuer la lecture de « Retour de Total sur le marché iranien : une victoire diplomatique de premier plan »

Frappe US en Syrie : la nuit des dupes masquait un joli de coup de billard

Les armées opèrent régulièrement des frappes sur des hangars vides afin de calmer les politiques. Pour Trump, il s’agit de s’emparer des leviers du pouvoir.

1– LA FRAPPE de cette nuit [du 7 avril] montre le retour en force des néoconservateurs au sein de l’appareil d’État américain. Ceux-ci étaient en compétition avec les isolationnistes prorusses mais ont réussi à éliminer successivement le général Flynn puis Steve Bannon. Donald Trump leur a donné un gage symbolique cette nuit. Ceci va satisfaire les lobbys de l’armement qui craignaient par-dessus tout la fin des guerres américaines. Ceci va également satisfaire Israël dont les États-Unis se sont rapprochés. La frappe permet enfin de rassurer l’électorat américain qui était gêné par le rapprochement américano-russe. Elle lui donne l’illusion que l’Amérique demeure encore forte et indépendante.  Continuer la lecture de « Frappe US en Syrie : la nuit des dupes masquait un joli de coup de billard »

Géopolitique : les États-Unis sur le chemin de la conversion au réalisme

A propos du rapport « Tendances mondiales 2035 » du Conseil national du renseignement américain : « Le paradoxe du progrès ».

LE NATIONAL INTELLIGENCE COUNCIL vient de publier son nouveau rapport de prospective pour 2035. Prenant le contrepied du précédent — dont les prévisions s’étaient révélées à l’opposé de ce qu’il advint — ce dernier s’est plié à un soupçon d’exigence et par conséquent de réalisme. Il est intitulé Paradox of Progress. Continuer la lecture de « Géopolitique : les États-Unis sur le chemin de la conversion au réalisme »

Les généraux de Trump, confesseurs du Président et gardiens de la cité

Trois grands professionnels pour conseiller le nouveau président américain : une même expérience, mais des écoles différentes.

DONALD TRUMP a désormais nommé trois généraux afin d’occuper les plus hautes fonctions de l’État américain : Michael Flynn sera Conseiller à la Sécurité nationale, James Mattis, secrétaire à la Défense, et John Kelly, secrétaire à la Sécurité intérieure. Cette militarisation de la haute administration ne doit pas nous étonner. Elle est inhérente aux temps de renaissance consécutifs à une crise impériale très grave. Continuer la lecture de « Les généraux de Trump, confesseurs du Président et gardiens de la cité »

Le diable Trump tiendra-t-il ses promesses ?

Trump élu, à qui la faute ? On attend l’examen de conscience de l’ensemble de la classe politique et de tous les détracteurs du milliardaire. En attendant, que peut-on espérer des promesses d’un président fantasque, élu par défaut ?

LA PESTE CLINTON ou le choléra Trump ? Les Américains ont tranché : ce ne sera pas la peste [1]. Ce sera le changement. Car s’il y a un premier responsable à l’élection de Trump, c’est Barack Obama et son bilan, et s’il y en a une seconde, c’est Hillary Clinton. Il est facile d’accuser Trump de tous les maux, mais s’il est aux portes de la Maison Blanche, c’est bien parce que l’ensemble de la classe politique lui a préparé la place en se rendant insupportable à la majorité des électeurs. L’heure devrait être à l’examen de conscience. Continuer la lecture de « Le diable Trump tiendra-t-il ses promesses ? »

Victoire de Trump : l’onde de choc géopolitique sera mesurée

L’élection de Donald Trump était tout à fait envisageable et il était d’une grande légèreté de ne pas en anticiper les conséquences géopolitiques, qui pouvaient bouleverser les relations internationales. Mais la nouvelle donne ne sera pas si considérable, d’après les géopoliticiens Thomas Flichy de La Neuville et Gregor Mathias (Paris IV-Sorbonne), et Olivier Hanne (Aix-Marseille).

DANS L’Abolition de l’esclavage paru en 1861, en pleine guerre de Sécession, le Français Augustin Cochin s’exclamait à propos du système politique américain : « La patrie de Franklin semble devenue le tréteau de M. Barnum [1]. » À moins que l’on découvre des manipulations électorales, comme les deux candidats le laissaient craindre durant la campagne, Donald Trump sera bien élu président des États-Unis. Quels seront les grands axes de sa politique et dans quel cadre international gouvernera-t-il ? Continuer la lecture de « Victoire de Trump : l’onde de choc géopolitique sera mesurée »

En Syrie, François Hollande fait encore le choix de la guerre

« Les bonnes âmes qui demandent aujourd’hui un cessez-le feu à Alep, demandent en fait la poursuite de la guerre et la poursuite des souffrances du peuple syrien. »

VOILA CINQ ANS que dans, dans l’affaire syrienne, la diplomatie française est à la fois ridicule et criminelle. Ridicule parce qu’elle se réduit, avec Hollande encore plus qu’avec son prédécesseur, à un alignement aveugle sur la diplomatie américaine dominée par les néoconservateurs. Alignement et même surenchère, pas sur le terrain car nous n’en avons pas les moyens, mais dans les enceintes internationales. On se souvient de Fabius déclarant que Assad « ne méritait pas de vivre » ! La rupture totale des relations diplomatiques avec la Syrie en 2012 nous a privé de moyens essentiels tant pour lutter contre le terrorisme que pour diversifier notre action comme il sied à toute diplomatie compétente, ce que n’est plus la nôtre. Continuer la lecture de « En Syrie, François Hollande fait encore le choix de la guerre »