Les chrétiens doivent-ils rester les bras croisés ?

Dans un dossier sur les catholiques et la révolution, Famille chrétienne m’interroge sur le sens de l’action des chrétiens dans le monde. « Jésus a dit : “Mon Royaume n’est pas de ce monde.” Les chrétiens doivent-ils rester les bras croisés ? »


LA RÉPONSE À CETTE QUESTION est donnée par Jésus lui-même, que l’on trouve dans l’Évangile de Jean. Les chrétiens sont ceux que Jésus appelle « les hommes que son Père a pris au monde » pour les lui donner (Jn 17, 6). Ces hommes n’appartiennent plus au monde (Jn 17, 16) mais demeurent dans le monde (Jn 17, 11). Or Jésus ne prie pas son Père pour qu’ils attendent le Ciel comme s’ils devaient vivre dans une bulle provisoire : « Je ne prie pas pour que tu les retires du monde, mais pour que tu les gardes du Mauvais » (Jn 17, 15).

De cette « situation » des chrétiens, il faut comprendre trois choses : 1/ les chrétiens qui ne sont pas du monde ont une mission dans le monde, 2/ cette mission va provoquer l’incompréhension mais 3/ le Royaume de Dieu est déjà présent.

Agir en se dépossédant

La mission est donnée par Jésus : « Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis et établis, afin que vous alliez, que vous portiez du fruit, et que votre fruit demeure. Voici ce que je vous commande : c’est de vous aimer les uns les autres » (Jn 15, 17).

La difficulté est dans l’incompréhension du monde à l’égard de cet autre Monde dont il pourrait dépendre, même si cette dépendance est appelée à être librement consentie. Le monde a de la haine contre les chrétiens, car ils appellent à aimer le monde en se dépossédant. « Si vous apparteniez au monde, le monde aimerait ce qui est à lui » (Jn 15, 19) : autrement dit, l’amour vrai du monde et des hommes ne passe que par la dépossession de soi-même, ce que le monde qui ne croit pas dans l’ordre du Créateur ne peut admettre.

Quelle responsabilité politique ?

Ainsi nous comprenons la responsabilité politique du chrétien : aider le monde à se libérer des idoles, à commencer par l’adoration de soi ou le mythe du bonheur garanti comme si l’ordre du monde dépendait de la volonté arbitraire des plus forts ou des plus nombreux, qui se veulent seuls maîtres du bien et du mal. C’est ainsi que même dans l’imperfection de la politique qui n’a pas les promesses du Salut (« Des pauvres, vous en aurez toujours parmi vous » (Jn 12, 8), le don de soi libérateur des uns pour les autres, le service des plus pauvres et de la vérité, procure déjà la joie du Royaume des cieux (Jn 17, 13).

Paru dans Famille chrétienne n°2193, 25-31 janvier 2020, p. 29.

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