En Syrie, François Hollande fait encore le choix de la guerre

« Les bonnes âmes qui demandent aujourd’hui un cessez-le feu à Alep, demandent en fait la poursuite de la guerre et la poursuite des souffrances du peuple syrien. »

VOILA CINQ ANS que dans, dans l’affaire syrienne, la diplomatie française est à la fois ridicule et criminelle. Ridicule parce qu’elle se réduit, avec Hollande encore plus qu’avec son prédécesseur, à un alignement aveugle sur la diplomatie américaine dominée par les néoconservateurs. Alignement et même surenchère, pas sur le terrain car nous n’en avons pas les moyens, mais dans les enceintes internationales. On se souvient de Fabius déclarant que Assad « ne méritait pas de vivre » ! La rupture totale des relations diplomatiques avec la Syrie en 2012 nous a privé de moyens essentiels tant pour lutter contre le terrorisme que pour diversifier notre action comme il sied à toute diplomatie compétente, ce que n’est plus la nôtre.

Politique criminelle car elle aboutit à armer des djihadistes qui massacrent tous ceux qui leur ont hostiles, à commencer par les chrétiens d’Orient qui comptaient sur la protection de la France. Ceux qui tiennent le quartier Est d’Alep depuis quatre ans avaient commencé, qui s’en souvient ? par précipiter leurs prisonniers du haut des immeubles. Les mêmes se réjouissent bruyamment (quand ils ne les revendiquent pas) des attentats perpétrés en France depuis deux ans.

L’enjeu de la bataille d’Alep

Le gouvernement syrien, sinon démocratique (il n’y a plus de démocratie, passé un certain seuil de tensions sociales, comme nous risquons d’en faire bientôt l’expérience) du moins légitime en droit international, a demandé l’appui des Russes dont l’intervention est donc légale. Toutes les autres interventions étrangères, à commencer par celle de nos forces spéciales en appui des djihadistes, sont illégales.

La présente bataille d’Alep montre que François Hollande n’a pas changé de ligne.

L’enjeu de cette bataille est simple. Les forces loyalistes ont reconquis une grande partie de la ville. Ne reste qu’un quartier tenu par des islamistes qui y ont pris en otage la population. Dès que ce bastion sera réduit, la guerre de Syrie sera terminée, sous réserve d’un nettoyage résiduel de groupes djihadistes dispersés.

Le cessez-le-feu, c’est  la poursuite de la guerre

Demander le cessez-le feu aujourd’hui au motif d’épargner les populations civiles, c’est vouloir empêcher les loyalistes et les Russes d’en finir avec les islamistes.

Les Russes ont naturellement les moyens de réduire en quelques jours la résistance. Si la bataille traîne, c’est, à l’encontre de la propagande déchaînée contre leurs supposés « crimes contre l’humanité », qu’ils tiennent à épargner la vie des civils, moins par humanisme d’ailleurs que par souci de l’opinion.

Que veulent donc ceux qui demandent un cessez-le- feu ? Que l’autre camp gagne ? Daesh au pouvoir à Damas ? Aucune puissance ne le souhaite vraiment et les massacres seraient alors immenses.

Si l’on ne veut la victoire ni du pouvoir ni des rebelles, la seule option est la poursuite de la guerre. Les bonnes âmes qui demandent aujourd’hui un cessez- le feu à Alep demandent en fait la poursuite de la guerre et la poursuite des souffrances du peuple syrien.

La propagande occidentale

Certains prônent le dialogue. Que Hollande et Cazeneuve montrent donc l’exemple en dialoguant avec les terroristes du Bataclan ! Ce sont les mêmes qui combattent aujourd’hui à Alep-Ouest. Aucune guerre civile ne s’est jamais terminée autrement que par la victoire d’un camp sur un autre. Et cette victoire vaut toujours mieux que la poursuite de la guerre. Dans le cas d’espèce, l’un des camps est sur le point de gagner, laissons-le aller jusqu’au bout. Quelle aurait été la valeur morale d’un appel au cessez-le feu début 1945, pour soi-disant épargner Berlin — et donc Hitler ? Les islamistes valent-ils mieux ?

La propagande a toujours joué un rôle considérable dans la guerre : la presse collaborationniste ne donnait pas en 1940 une meilleure image de Churchill que la nôtre d’Assad. Ce qui est nouveau, c’est la puissance effrayante de la machine de propagande occidentale, fondée sur une presse conforme.

Le manichéisme qu’elle diffuse est inséparable d’une idéologie qui, comme toutes les idéologies, conduit au mensonge. Mensonge que de prétendre qu’il y a entre Assad et Daesh des islamistes modérés : tous veulent établir la charia et éliminer les minorités : les chrétiens le savent. Mensonge que d’accuser le régime de certains crimes (pas de tous, hélas, car cette guerre est sale), commis en réalité par ses ennemis telle l’attaque chimique de la Ghouta (21 août 2013) [1]. L’ambassadeur syrien à l’ONU a accusé les Français d’avoir aidé Al Nosra (dont le même Fabius disait qu’ils faisaient du « bon boulot ») à monter cette provocation qui nous a mis au bord de la guerre mondiale. On aimerait être sûr que ce n’est pas vrai, tant la politique de la France en Syrie au cours de ces dernières années a pris une tournure démoniaque.

Logique de guerre

De la même eau, malgré les apparences, est le projet de résolution déposé par la France (et l’Espagne habituellement mieux inspirée) au Conseil de sécurité demandant un cessez-le-feu immédiat à Alep. Ce n’était pas un acte de paix mais en réalité un acte de guerre, visant, si elle était passée, à prolonger la guerre et en tous les cas isoler la Russie et la Chine qui ont dû mettre leur veto à un moment où la tension internationale est à son comble.

C’est la rage au cœur que la puissance dominante voit en effet aujourd’hui ses alliés islamistes, malgré les armes sophistiquées qu’ils leur ont livrées, perdre la guerre de Syrie : le chef d’état-major des forces armées américaines, Mark Milley, vient de déclarer qu’un « conflit extrêmement meurtrier » avec la Russie est « quasiment certain ». Ashton Carter, le secrétaire à la Défense d’Obama, prix Nobel de la paix, a indiqué que les USA se réservaient le droit d’effectuer une « première frappe nucléaire ».

Si, comme il l’envisage, Hollande refuse de recevoir Poutine lors de sa venue prochaine, il nous ferait entrer dans une logique de guerre mondiale.

 

 

[1] Deux rapports décisifs l’ont établi, l’un du MIT, l’autre du Comité contre les armes chimiques de l’ONU (ce dernier soustrait au public). Cf. Conscientia, 18/01/2016 « Le camp du bien a menti ».

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