L’école catholique est-elle malade de la transmission ?

Des enseignants expliquent la racine de la différence entre les projets pédagogiques de l’Éducation nationale depuis des décennies et la sagesse chrétienne de la transmission dans l’enseignement.

LE SOUTIEN apporté par le Secrétariat général de l’Enseignement catholique et de l’APEL nationale à la réforme du collège a heurté de nombreux établissements scolaires catholiques. Ce sont aussi bien des chefs d’établissement, des enseignants (80% d’entre eux sont contre) que des parents qui ont manifesté leur mécontentement. 

La tendance de l’enseignement catholique à s’organiser sur le modèle du système scolaire public, à l’origine d’une centralisation de plus en plus nette ­­— certains parlent de « monopole partagé » — était déjà en soi un motif de débat sérieux : il est tout de même fâcheux que le principe de subsidiarité s’applique mal dans une communauté catholique, et a fortiori dans une institution libre, regroupant des écoles libres, au service de parents libres. Mais le soutien unilatéral apporté aux réformes du ministère de l’Éducation nationale va plus loin, car il touche à l’essence de la pédagogie chrétienne, à sa conception de la personne et de la transmission.

Il ne suffit pas de se justifier en prétendant que la liberté est garantie puisque « l’organisation des enseignements » est laissée aux établissements, alors que les programmes, leur volume horaire et leur modulation sont fixés… par arrêté du ministre.

C’est bien le cœur de la pédagogie chrétienne qui est touché quand la philosophie générale du pédagogisme des réformes scolaires depuis 1975 vise à rompre le principe de la médiation dans la transmission, faisant de l’enfant le pivot de la pédagogie, aux dépens de l’axe maître-savoir-élève. Toute la sagesse de l’enseignement est ainsi renversée : l’élève devient le maître, le savoir se construit, l’école ne transmet plus mais « adapte ». Or si l’école catholique a bien une originalité, c’est de respecter l’enfant dans une nature qui se reçoit avant de se vouloir. D’où une pédagogie fondée sur une anthropologie de l’accueil de la vérité dans la liberté, aux antipodes du conditionnement constructiviste de l’Éducation nationale.

« Nous voulons toujours éduquer, mais nous ne voulons plus transmettre » déplore le philosophe François-Xavier Bellamy dans Les Déshérités (Plon). Il serait dramatique que les chrétiens, à l’origine de l’école en France, partagent avec le service public la même maladie du refoulement de la transmission. Cette crise serait-elle une crise de la foi, la foi étant elle-même un don qui se « transmet » ?

 

 

 

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