Emmanuel Macron ou le droit du plus fort

Dans cette tribune publiée par Famille chrétienne, réflexion sur le double langage macronien : dans la jungle apaisée du « premier de cordée », la vie est sacrée à condition d’en disposer si la collectivité le désire. Il suffit d’en débattre.

PROMESSE TENUE, les députés ont voté la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et son remplacement par un impôt sur la fortune immobilière (IFI). La mesure, qui vise à réorienter l’épargne vers le financement des entreprises, est diversement appréciée, notamment par les familles qui se constituent un patrimoine immobilier transmissible.

Pour Emmanuel Macron, il s’agit d’encourager les Français qui investissent. Même s’il y a parfois plus de mérite à investir dans l’immobilier que dans des obligations d’État, l’image de la « cordée » qu’il a utilisée pour justifier son cadeau fiscal est assurément positive.

Un modèle de société ambivalent

Cette image montre que la société s’appuie sur une complémentarité entre les citoyens, chacun selon ses talents. Dans une société libre et harmonieuse, certains prennent des risques qui profitent à tous. L’image n’oppose pas les riches et les moins riches, les chefs et les subordonnés selon le schéma marxiste de la lutte des classes.

À cet égard, le chef de l’État suit une logique libérale qui rompt avec le discours socialiste, et que la droite conventionnelle n’osait plus revendiquer.

Mais il y a un mais. Quand cette vision s’inscrit dans un modèle de société qui repose non sur la dignité de la personne humaine et le service du bien commun, mais sur la puissance de la liberté individuelle dès lors qu’elle s’enrichit, nous ne sommes plus dans un schéma respectueux des différences sociales complémentaires.

La vie ou le désir

Le jour de la commémoration du martyre du père Hamel, Emmanuel Macron avait fait référence à cette « part sacrée » qui « au cœur de nos lois ne se négocie pas : la vie d’autrui ». Mais pendant son entretien télévisé du 16 octobre, il déclare reconnaître la possibilité aux femmes seules et aux couples lesbiens, de fabriquer des enfants privés de père.

Cette déclaration est emblématique de la supercherie macronienne. Ce qui est sacré, c’est la vie d’autrui à condition d’en disposer si la collectivité l’a décidé. Ce qui n’est pas négociable, c’est le droit du plus fort, si celui-ci est reconnu au terme d’un « débat apaisé ».

Le droit n’est plus associé à la protection de ce qui est dû à chacun en raison de sa dignité, mais à ce qui est dû à chacun en raison de ce qu’il désire.

La loi de la « jungle apaisée »

Le cardinal Vingt-Trois l’a fait remarquer lors de la messe des parlementaires, le 17 octobre : « Nous ne pouvons pas fortifier une société réellement démocratique en plaçant les désirs personnels au-dessus de toute réflexion éthique. » Par glissement, ce désir s’exprime de plus en plus dans la possession. Le résultat est mécanique : c’est l’économie qui fait la politique. L’enfant fabriqué est une marchandise.

Dans cette logique, le premier de cordée soutenu par l’État est aussi le plus fort. Ce n’est pas le protecteur du droit, mais son bénéficiaire. Le droit du plus fort, c’est la loi de la jungle, ni plus ni moins. Une jungle « apaisée » peut-être, contrôlée par l’État, mais où le plus faible n’a qu’un seul droit : celui de consentir à la loi du plus fort.

 

Tribune publiée par Famille chrétienne du 4 novembre 2017.

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